Lorsqu’on rencontre un(e) inconnu(e) au détour d’un repas chez des amis par exemple, peu après avoir parlé de la pluie et du beau temps, tout juste entre les sujets d’actualité et la politique vient le moment où on doit aborder celui de sa profession. « Et sinon c’est quoi ton job ? » C’est une question que l’on pose souvent par courtoisie et surtout qui permet de se situer socialement. Elle permet peut-être aussi de juger quelles sont les opinions de l’autre, de savoir quelle blague à propos on va pouvoir glisser au moment opportun.

« Je suis prof de maths. » Après un petit silence et un regard compatissant, les réactions sont souvent du même type.  « J’ai toujours été nul(le) en maths !! J’ai eu un prof en 4ème qui m’a dégouté(e) des maths… J’aurais bien aimé être plus doué(e), mais c’est loin tout ça maintenant ! » Les mathématiques semblent être depuis la nuit des temps la bête noire d’à peu près tous ceux qui sont allés user leur pantalon sur les bancs de l’école.

Alors quoi ? Est-ce vraiment une matière si difficile ? Est-ce que, comme on me le dit souvent, c’est une matière si inutile dans la vie de tout les jours ? Est-ce juste une matière élitiste, une matière qui permet de qualifier les uns, d’éliminer les autres ?

Il n’y a pas de juste milieu, soit on est matheux, soit on ne l’est pas. Soit on doit travailler comme un dingue pour réussir à tirer une note honorable, soit on se vante d’avoir eu une note excellente sans jamais avoir ouvert un cahier… Ainsi les maths feraient parties du patrimoine génétique, soit on a le gène, soit on est condamné à errer dans un labyrinthe froid et obscur semé de théorème et autres corollaires ! Pas si sûr…

On a tous passé des moments difficiles, des moments où on se dit « les autres y arrivent pourquoi pas moi ? » Mais à bien y réfléchir, lorsqu’on débute dans une activité, il est rare que l’on s’en sorte immédiatement. Apprendre à marcher, à lire, à faire du vélo… à conduire.

La conduite ! C’est vraiment un moment inoubliable… enfin, non en fait. La plupart des détenteurs du permis ont complétement oublié leurs premières heures de conduite. Celles où assis confortablement, totalement paniqué, on voit 3 pédales, un levier de vitesse, le volant, le tableau de bord, les rétroviseurs… « Bien, aujourd’hui on va juste utiliser le volant ! » Ouf, le moniteur a lui aussi un jeu de pédale. Rien que de penser qu’il va falloir tout gérer dans les 20 prochaines heures, c’est la panique ! Alors OK, apprendre à conduire c’est difficile mais pas insurmontable, il y a beaucoup de paramètres à gérer c’est sûr mais tout le monde peut le faire. Il y a une anecdote qui m’a particulièrement marquée. j’avais déjà quelques heures de conduites à mon actif, lorsque le moniteur m’a amené dans une rue particulièrement pentue. Feu rouge. Ah. Démarrage en côte du coup… Oui mais un démarrage en côte c’est pas facile. Dans mon esprit c’est évident que je devais caler. J’y vais ! Je cale… Je recommence ! Je cale… Encore une fois. Et ça recale… Sauf que c’est une rue à sens unique qu’il y a déjà 10 voitures derrière, que ça klaxonne et que la panique n’aide pas. A côté de moi, le moniteur est serein. « Qu’est-ce qui t’arrive ?

-C’est difficile un démarrage en côte !!

-Concentre toi !

-OK, mais là, dans 10 minutes on y est encore…

-Vu comme tu t’y prends, c’est certain !!

-Quoi ?! Frein à main. J’accélère. La voiture se soulève. Je déserre le frein doucement. Je cale !

-Oui, mais ça c’est après !

-Après ?!

-Après avoir passer la première, là t’es en troisième !! »

La morale, c’est que persuadé de la difficulté de l’opération, j’étais convaincu que le problème venait du démarrage, et non d’autre chose. Les maths sont soumises au même principe, ceux qui savent ont oublié qu’ils ont un jour appris, et ceux qui échouent pensent que c’est parce que c’est trop difficile, peut-être s’y prennent-ils juste mal. Le cerveau est le moteur en mathématiques, si on l’utilise de la mauvaise façon, il cale !